Traitement de la dyspraxie verbale chez l’enfant

Volume 11, numéro 2, 2013

Une toute nouvelle initiative de collaboration entre l’Université McGill et le Centre de réadaptation MAB-Mackay vise l’élaboration de nouvelles thérapies pour traiter la dyspraxie verbale chez l’enfant. Ce projet a le double avantage de fournir des services cliniques importants aux personnes atteintes de dyspraxie verbale et de donner aux étudiants en orthophonie de McGill l’occasion d’apprendre comment traiter ce trouble de la parole complexe d’origine neuromotrice.

La dyspraxie verbale est caractérisée par une difficulté à exécuter des programmes moteurs, qui entraîne une piètre maîtrise de la parole volontaire. L’élocution exige un grand effort et est généralement inintelligible. Les enfants atteints de dyspraxie verbale ont des profils plutôt variés et à l’heure actuelle, aucune méthode thérapeutique efficace dans tous les cas n’a été établie. Même pour un orthophoniste d’expérience, la dyspraxie verbale est très difficile à traiter. Traiter les enfants atteints de dyspraxie est donc un défi de taille pour les étudiants de McGill, mais ces derniers sont fiers de contribuer à l’avancement des connaissances dans un domaine où elles font cruellement défaut.  

Le projet TASC (Treating Apraxia of Speech in Children, ou « Traitement de la dyspraxie verbale chez l’enfant »), une étude financée par la Childhood Apraxia of Speech Association of North America (CASANA), est coordonné par des chercheurs de l’École des sciences de la communication humaine de McGill, sous la direction de Susan Rvachew, Ph. D. Les étudiantes en orthophonie ont été supervisées par Tanya Matthews, Megan Braun et Sophie Vaillancourt et le projet se déroule au Centre de réadaptation MAB-Mackay, à Montréal.  

L’initiative a pour but d’étudier l’efficacité des techniques d’orthophonie qui s’appuient sur les principes de l’apprentissage moteur. L’apprentissage moteur détermine comment nous pouvons acquérir des habiletés motrices comme rouler à bicyclette, jouer du piano et même, dans le cas qui nous intéresse, parler. Notre apprentissage d’un nouveau programme moteur peut être influencé par différents types d’exercices et de rétroaction. Diverses combinaisons de conditions de pratique et de rétroaction peuvent être plus ou moins efficaces d’un enfant à l’autre, selon les caractéristiques sous-jacentes du trouble de la parole. Dans le cadre de cette étude, l’enfant suit parfois un traitement où il apprend à écouter attentivement la parole, afin de mieux percevoir les mots-clés et de détecter les erreurs dans sa propre parole. Dans d’autres cas, le traitement consiste à apprendre à l’enfant à utiliser des indices visuels pour mieux articuler et aligner correctement les sons des mots qu’il prononce.

Pendant 24 semaines, de janvier à juillet 2013, 11 enfants étant atteints de dyspraxie verbale ont profité gratuitement de traitements d’orthophonie au Centre MAB-Mackay. Le programme du TASC prévoyait trois séances par semaine pendant six semaines. Chaque séance durait environ une heure, pour un total de 18 heures de traitement. Pendant ce temps, les chercheurs de McGill ont récolté des données sur les progrès des enfants par rapport à leurs objectifs respectifs dans différentes conditions de traitement.

Les avantages de ce projet sont multiples. D’abord, il procure l’accès à un traitement spécialisé à une clientèle pour laquelle les services sont souvent inexistants ou inadéquats. « De nombreux parents étaient reconnaissants de recevoir ce service et que leur enfant ait simplement la chance de recevoir un traitement, explique Tanya Matthews, coordonnatrice du projet TASC. Ils étaient également heureux que les renseignements que nous avons recueillis puissent être utilisés plus tard dans le cadre de la thérapie individuelle de leur enfant pour contribuer à personnaliser réellement le traitement en fonction des besoins. »  Quant à la réponse des enfants au traitement, les parents émettent déjà des commentaires positifs. Une mère a confié que son enfant avait commencé à employer à la maison des groupes consonantiques avec « L », démontrant ainsi que son enfant a généralisé les objectifs de langage de la thérapie pour les appliquer à des contextes de la vie réelle.

Sur le plan de la recherche, le projet offre la possibilité de trouver quelles méthodes de traitement sont les plus efficaces auprès des patients atteints de dyspraxie verbale. « Cette étude permettra aux orthophonistes d’assurer la correspondance entre une approche de traitement et les caractéristiques individuelles de leurs clients, notamment ceux atteints d’une forme grave de dyspraxie verbale », affirme Mme Matthews. C’est une percée de taille dans le domaine de l’orthophonie, qui pourrait aider davantage de cliniciens à traiter efficacement ce trouble.

Enfin, le projet TASC a créé des occasions d’apprentissage pour les étudiantes en orthophonie de McGill, pour qui la plupart des séances de traitement s’intégraient dans leur stage clinique. « Pouvoir travailler avec cette clientèle est une très belle expérience, raconte Amanda Ovadia, étudiante clinicienne. Les étudiants n’ont pas beaucoup l’occasion de se familiariser avec la dyspraxie verbale chez l’enfant. »

Au cours des prochains mois, les données du groupe visé par le projet TASC seront analysées afin de déterminer quelles méthodes de traitement ont été les plus efficaces auprès des patients. De plus, chaque famille sera informée des progrès individuels de son enfant – des renseignements qui seront fort utiles lorsque l’enfant retournera en orthophonie, que ce soit au privé ou en milieu scolaire. Au bout du compte, la combinaison de formation clinique, de thérapie et de recherche qui compose le projet TASC ouvre la voie à une meilleure compréhension de la dyspraxie verbale chez l’enfant, ainsi qu’à des méthodes de traitement améliorées, au profit de ceux qui en ont besoin.

 

 

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