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Les équipes de médecins de famille défient la COVID-19 en se connectant aux patients par le biais de la télésanté

Publié: 6 July 2020

Il n’a fallu que quelques secondes au Dr Mark Karanofsky pour regarder son patient et comprendre que quelque chose n’était pas normal : Antonio José Santiago marchait en boitant et le côté droit de son visage était affaissé.

Un AVC, sans aucun doute!

Le Dr Karanofsky a rapidement expliqué la nature de l’urgence à M. Santiago et à son épouse, Eunice Gomes Santiago, qui ont promptement obtenu de l’aide médicale avant que l’état de M. Santiago ne s’aggrave.

Il s’agissait d’une situation urgente, bien sûr, mais c’est une situation qui se produit presque quotidiennement à Montréal. Alors, pourquoi la distinguer des autres? Parce que le Dr Karanofsky a établi un diagnostic en regardant l’écran d’un ordinateur lors d’une vidéoconférence avec les Santiago.

Dans un sens, M. Santiago a eu de la chance. Quand il a eu son AVC à son domicile, le 17 avril, il devait communiquer par Zoom avec le Dr Karanofsky, le directeur intérimaire du Centre de médecine familiale Goldman Herzl à l’HGJ, pour un examen de routine.

Cela signifiait que le médecin était en ligne avec Madame Santiago quand cette dernière lui a expliqué que son mari, âgé de 78 ans, ne se sentait pas bien depuis qu’il avait effectué quelques réparations dans leur maison de Candiac, plus tôt dans la journée.

Néanmoins, la liaison par vidéo s’est avérée essentielle : en permettant au médecin d’avoir une confirmation visuelle des symptômes de M. Santiago, la voie était ouverte pour qu’il reçoive des soins dans un délai raisonnable.

Pour le Dr Karanofsky, cet incident prouve la valeur de la télésanté, particulièrement si la visite a lieu par vidéo, dans des circonstances comme le confinement de la COVID-19, quand le patient est dans un lieu (habituellement son domicile), tandis que le médecin est dans un autre.

« Quand j’ai décrit le problème, je n’ai pas paniqué », se souvient Madame Santiago, « parce que j’avais vraiment l’impression que le Dr Karanofsky était ici, avec nous. Ses directives étaient d’une grande importance parce que nous savions qu’il pouvait vraiment voir et comprendre ce qui se passait ».

Bien que l’HGJ soit l’hôpital de prédilection de M. Santiago, le temps pressait et il a été transporté à l’Hôpital Charles Le Moyne qui est plus près de son domicile. Après quatre jours de traitements, il a obtenu son congé et continue de se rétablir progressivement.

« Il est évident que tout ne peut pas être soigné à distance », dit le Dr Karanofsky, « mais, avant la pandémie de la COVID-19, ce que nous pouvions faire par le biais de la télésanté n’était pas toujours clair, surtout pour les patients. Je crois que la situation est bien différente maintenant ».

Une autre solution à la plupart des visites en personne

Pendant la pandémie, les rendez-vous par le biais de la télésanté (également connu sous le nom de télémédecine) sont devenus la norme au Centre de médecine familial Goldman Herzl à l’HGJ, et le nombre de visites en personne a rapidement chuté à une moyenne d’environ 12 pour cent de l’ensemble des consultations.

Au cours de la première semaine de mai, par exemple, seulement 243 rendez-vous en personne ont été enregistrés comparativement à 1 964 en télémédecine (vidéo ou téléphone). Le total de 2 207 visites de cette semaine est à peu près le même que celui de toutes les visites en personnes à la clinique lors d’une semaine typique avant la COVID-19.

Avant la COVID-19, les consultations en télémédecine étaient relativement rares, non seulement dans les centres du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal, mais à l’échelle du Québec.

Selon le Dr Justin Cross, directeur de la santé numérique au CIUSSS, la raison principale de cette rareté était que le ministère de la Santé et des Services sociaux refusait d’approuver les remboursements généralisés aux médecins pour la plupart des activités en télésanté.

Le moment décisif a eu lieu en février, peu de temps avant que la pandémie de la COVID-19 ne frappe la province. Le ministère a compris que pour prévenir la propagation du virus, la plupart des patients (et plusieurs membres du personnel, y compris certains cliniciens) devaient rester loin des hôpitaux et de certains autres centres de soins de santé.                                 

Ainsi, agissant rapidement, le gouvernement a « approuvé les remboursements généralisés pour la plupart des services que les médecins prodiguaient par vidéo ou par téléphone », explique le Dr Cross.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a franchi une autre étape importante en négociant directement avec Zoom pour obtenir « des comptes qui répondaient à des normes de sécurité et d’encodage plus élevées », ajoute le Dr Marc Miresco, directeur, Services externes pour adultes, Institut de psychiatrie communautaire et familiale à l’HGJ.

Le Centre de médecine familial Goldman Herzl avait déjà pris les devants. En effet, la Direction des technologies de l’information du CIUSSS avait muni le Centre de dossiers électroniques avant le début de la pandémie. Quel que soit l’endroit où ils se trouvaient, les membres du personnel du Centre avaient désormais facilement accès aux dossiers de leurs patients et aux autres renseignements essentiels.  

Un changement presque instantané

Le Dr Karanofsky secoue la tête, encore abasourdi à l’idée ce qu’il a fallu pour que le Centre adopte la télésanté. « Le vendredi 13 mars, nous avons été avisés que dès lundi, 70 pour cent de nos activités devaient être virtuelles ».

« Nous étions stupéfaits, car nous recevions en moyenne environ 360 visites en personne par jour la veille de la COVID-19, et réduire ce nombre à un peu plus de 100 en 72 heures semblait impossible. »

« Mais, d’une manière ou d’une autre, nous y sommes arrivés! Les visites en personne ont diminué d’environ 70 pour cent dès le lundi. Et, une semaine ou 10 jours plus tard, nous en étions au point où environ 90 pour cent de nos visites avaient lieu par télémédecine. »

« Chacune des équipes du Centre de médecine familial Goldman Herzl à l’HGJ s’est efforcée de déterminer ce qu’elle pouvait faire pour que la télémédecine fonctionne. Avec le recul, nous pensons avoir accompli quelque chose comme cinq ans de changement en quatre semaines. »

« C’était impressionnant de rouvrir ce lundi matin de la mi-mars et de voir notre salle d’attente pratiquement vide », se souvient la Dre Mylène Arsenault, médecin de famille au Centre.

La Dre Arsenault a également compris qu’il s’agissait d’une nouvelle manière de travailler pour plusieurs membres du personnel (pas seulement pour les patients), et elle a pris la décision d’aider à développer un module de formation en télémédecine pour le Centre de médecine familial Goldman Herzl.

« La télémédecine n’est pas enseignée à la faculté de médecine », dit-elle, « par conséquent, nous avons besoin du module pour former nos médecins et nos résidents sur la manière d’utiliser cet outil en toute sécurité. Ils ont rapidement compris que l’écran vidéo pouvait leur transmettre une foule d’information ».

« La télémédecine ne peut pas être utilisée pour effectuer des actes médicaux qui exigent une palpation ou un contact physique, des choses comme la vaccination ou écouter les battements du cœur d’un fœtus ou encore effectuer un examen gynécologique. C’est la raison pour laquelle il doit encore y avoir des visites en personnes pour certains patients. »

« Mais il est certain que beaucoup de choses peuvent être faites en toute sécurité et adéquatement, comme le soutien psychologique en santé mentale et le suivi des maladies chroniques. »

Un coup d’œil sur le cadre de vie

À certains égards, ajoute le Dr Karanofsky, la télémédecine peut être supérieure à une visite en personne, puisqu’elle permet au médecin de voir le milieu de vie du patient, ce qui était seulement possible auparavant lors d’une visite à domicile.

« Par exemple, si le patient est âgé et que son domicile semble encombré de trop de meubles, le médecin peut supposer qu’il pourrait y avoir un risque de chute. Nous avons facilement diagnostiqué des éruptions cutanées et même des blessures musculo-squelettiques par vidéoconférence. »

« L’essentiel est de toujours avoir la possibilité, et nous nous en assurons, de faire venir les patients pour une visite en personne, si les circonstances l’exigent. Les mesures sont également en place pour nous assurer que les visites en personne peuvent avoir lieu rapidement, en toute sécurité et de manière à prévenir la propagation de la COVID-19. »

Comme les patients sont à leur domicile lors des visites virtuelles, ils sont habituellement plus détendus et à l’aise, explique Sabina Figueira, l’une des infirmières cliniciennes spécialisées en diabète et en soins cardiométaboliques, au Centre de médecine familial Goldman Herzl.

« Pendant la pandémie, ces patients se sentaient particulièrement en sécurité puisqu’ils ne risquaient pas d’être exposés au coronavirus à l’Hôpital. Les visites de suivi sont également offertes régulièrement, de sorte que si par exemple, un patient prend un nouveau médicament, nous pouvons lui téléphoner et continuer de surveiller son état de santé. »

Même le portail en ligne du Centre a été plus occupé, ajoute Madame Figueira. « Nous avons pu envoyer des documents et des requêtes numériques à nos patients. Habituellement, ils auraient été obligés de venir au Centre et de se stationner, puis de retourner à leur domicile. Maintenant, toute cette démarche est inutile. Il s’agit d’un énorme changement pour eux ».

Mais, qu’en est-il du futur? Est-ce que la situation qui existait avant la COVID-19 s’insinuera de nouveau au Centre quand la menace sera enrayée? Le Dr Karanofsky en doute fortement.

À titre de membre du comité de planification de l’après-pandémie du Centre, il reconnaît que le niveau des visites effectuées en télésanté ne se situera probablement plus entre 87 et 88 pour cent. Cependant, « à moyen terme, nous pensons qu’au moins 60 pour cent de toutes les visites pourraient être traitées complètement ou partiellement par le biais de la télémédecine ».

Nous devrons probablement voir les nouveaux patients en personne, explique le Dr Karanofsky, parce qu’il y a des choses que nous devons voir, toucher et sentir. Mais nous avons fait des recherches pour savoir ce qui se passe ailleurs dans le monde et, idéalement, nous pensons que de 60 à 70 pour cent des visites en médecine familiale pourraient être faites avec un élément de télémédecine.

« C’est la voie de l’avenir », convient la Dre Arsenault, « et la COVID-19 vient de nous propulser dans l’ère de la télémédecine. Et, cette démarche est bien enracinée! ».

Article original provenant des Nouvelles HGJ, cliquez ici

 

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